Quatorze ans après avoir retourné Hollywood et choqué l’Amérique, Borat est de retour. Mais cette fois, l’objectif n’est plus seulement de faire rire. Il veut frapper fort. Très fort. Et il le fait dans un pays au bord de l’implosion, à quelques semaines d’une élection tendue, au cœur d’une pandémie mondiale. Fini l’humour naïf et potache. Borat revient avec un film plus noir, plus politique, plus engagé. Et autant le dire tout de suite : ça décoiffe.
Un personnage devenu trop célèbre
Mission impossible ?
Comment continuer à piéger les Américains quand tout le monde connaît ton visage ? C’était là tout le défi. Borat, figure culte de 2006, ne pouvait plus se balader librement caméra au poing. Trop célèbre. Trop reconnaissable. Mais ce qui aurait pu être un obstacle devient ici un levier narratif génial.
Notre héros kazakh se déguise. Il change de look. Il devient lui-même une parodie de ses propres caricatures. Et ces couches de déguisements ajoutent encore plus d’absurde à des situations déjà surréalistes. C’est malin. C’est efficace. Et ça relance la machine.
Une histoire mieux construite
Dans ce nouvel opus, Borat n’est plus seul. Il arrive en mission, envoyé par son pays pour offrir un cadeau… très particulier à un membre influent du gouvernement américain. Ce cadeau ? Sa propre fille, Tutar. Oui, vous avez bien lu. Et autour de cette idée improbable, le film tisse une vraie trame. Une histoire avec un début, un milieu, une fin. Avec des rebondissements. Des personnages. Et une évolution.
Le duo père-fille devient le cœur du film. L’humour naît autant des situations que de leur relation. Et c’est ce fil narratif qui donne au film sa cohérence, sa force, sa profondeur.
Satire en mode attaque frontale
Un film comme une bombe politique
Dès les premières scènes, on comprend que cette suite ne sera pas un simple délire comique. Borat 2 vise juste. Et vise fort. C’est un acte politique, pur et dur. Chaque rencontre, chaque séquence est pensée pour révéler les travers d’une certaine Amérique : sexiste, complotiste, raciste, anti-science.
Le film sort juste avant les élections présidentielles de 2020. Et ce n’est pas un hasard. Tout est fait pour exposer une idéologie conservatrice à la dérive. Borat infiltre des cercles extrémistes. Il pousse ses interlocuteurs dans leurs retranchements. Et les résultats sont souvent effrayants.
Moins de hasard, plus de précision
Là où le premier film misait sur l’improvisation et l’innocence du personnage, cette suite est plus maîtrisée. Plus ciblée. Chaque caméra cachée devient une opération commando. Le film joue avec les codes du documentaire pour mieux piéger ses victimes. Et les réactions obtenues disent beaucoup sur l’époque.
Ce changement de ton peut surprendre. Il peut déranger. Mais il colle parfaitement à la réalité d’un monde qui a, lui aussi, changé.
La fille de Borat, révélation inattendue
Un personnage fort, drôle, touchant
Tutar, la fille de Borat, est la grande surprise du film. Au départ, on la découvre enfermée dans une cage, élevée dans un monde où les femmes ne peuvent ni lire, ni conduire, ni réfléchir. Mais au fil du voyage, elle s’éveille. Elle observe. Elle comprend. Et elle s’émancipe.
Sa transformation donne au film une dimension féministe inattendue. Elle confronte deux visions du monde : l’oppression assumée et l’oppression masquée. Car même en Amérique, la misogynie rôde. Elle change simplement de visage.
Une dynamique père-fille émouvante
Ce lien entre Borat et Tutar évolue au fil du film. Lui aussi change. Il écoute. Il apprend. Il se remet en question. Et c’est rare dans un film comique d’assister à une telle évolution de personnages.
La scène finale le confirme : ce n’est plus lui le héros. C’est elle. Et cette passation de flambeau donne à l’ensemble une émotion réelle. Sincère. Profonde.
Quand le rire devient inconfort
Malaise et fou rire
Oui, on rit. Mais souvent, on rit jaune. Le film aligne les moments gênants. La fameuse danse de fertilité. L’entretien chez le chirurgien esthétique. L’interview finale qui glace le sang. Chaque scène pousse à la limite du supportable.
Et ce n’est pas gratuit. Ce malaise, il est voulu. Il force à réfléchir. Pourquoi est-ce qu’on rit ? Est-ce qu’on devrait rire ? Qui est le vrai “fou” dans cette histoire ? Borat ou ses interlocuteurs ?
Un humour qui interroge
Ce rire, c’est une arme. Un miroir. Un révélateur. On rit… puis on se sent coupable. On se demande ce qu’on vient de voir. Et c’est là toute la force du film. Il bouscule. Il provoque. Il dérange. Mais il ne laisse jamais indifférent.
Un contexte sanitaire qui change tout
Le Covid s’invite dans le film
Initialement, rien ne laissait penser que la pandémie serait abordée. Et pourtant, elle devient centrale. Car le tournage a été interrompu. Et plutôt que de fuir la réalité, l’équipe décide de l’intégrer.
Résultat : le virus, les masques, la peur, les théories du complot… tout est là. En temps réel. Et cela donne au film une puissance documentaire inattendue.
Une immersion sidérante
L’un des moments les plus marquants reste la colocation de Borat avec deux partisans QAnon. Il les écoute. Il s’adapte. Et il les pousse doucement à se dévoiler. Ce ne sont plus des caricatures. Ce sont des visages, des voix, des discours. Et c’est glaçant.
Le film montre comment la désinformation se propage. Comment elle enferme. Comment elle détruit le lien à la réalité. Et là encore, derrière le rire, c’est un cri d’alerte.
Une œuvre satirique de son temps
Une critique de la société américaine
Borat 2 ne fait pas dans la demi-mesure. Il attaque. Il expose. Il dénonce. Il parle de misogynie, de racisme, de négationnisme, de corruption, de peur, de bêtise, de violence.
Mais il le fait sans moralisme. Sans discours. Il laisse parler les images. Les situations. Les réactions.
Un film militant, mais jamais ennuyeux
La grande réussite, c’est d’avoir trouvé l’équilibre. Le propos est grave. Mais le ton reste drôle. Le rythme est effréné. L’écriture est fine. Et malgré la noirceur du fond, on ressort… ébranlé, mais conquis.
C’est une satire brillante, qui aurait pu sombrer dans l’agressivité pure. Mais qui choisit la subtilité. L’ironie. Le décalage.
Ce qu’on retient
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Borat n’est plus le même, et c’est tant mieux.
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Le film est plus politique, plus construit, plus risqué.
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Tutar est une révélation, drôle et puissante.
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L’humour fait mal, mais il fait mouche.
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La pandémie a offert un tournant narratif inattendu mais décisif.
 
En conclusion…
Borat 2 est bien plus qu’une suite. C’est un miroir tendu à une société en crise. Une satire féroce, mais lucide. Une œuvre qui ose. Qui choque. Qui dérange. Et qui, derrière les déguisements et les grimaces, dit quelque chose de vrai. De nécessaire.
Une comédie ? Oui.
Mais surtout un avertissement.
Un cri.
Un coup de poing déguisé en éclat de rire.


	